Points clés sur la législation d’urgence italienne COVID-19 et l’industrie des médias

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Les implications juridiques et réglementaires découlant de la pandémie COVID-19 sont variées et couvrent tous les domaines du droit, des opérations de fusions-acquisitions au droit des contrats, en passant par les procédures judiciaires, la propriété intellectuelle et le droit du travail.

L’industrie des médias n’est pas exempte de cette problématique.

En effet, dans le domaine de la législation d’urgence, le gouvernement italien et l’Autorité Italienne des Communications (« AGCOM ») ont introduit des mesures spécifiques visant à soutenir l’industrie des médias, en sauvegardant les principes d’exhaustivité, d’objectivité et d’impartialité de l’information tels qu’ils sont consacrés par l’article 21 de la Constitution italienne, et à maintenir les fournisseurs de services de communication électronique à un niveau élevé.

L’objectif de cet article est donc de donner un aperçu des mesures susmentionnées.

Les mesures adoptées par le gouvernement italien

Le 17 mars 2020, le gouvernement italien a adopté le décret-loi n° 18 du 17 mars 2020 contenant des mesures visant à renforcer le service national de santé et à soutenir financièrement les familles, les travailleurs et les entreprises en relation avec la crise COVID-19 (le « Décret Cura Italia »). Certaines dispositions de ce décret réglementent expressément des aspects spécifiques de l’industrie des médias.

  • Création de deux fonds pour soutenir l’industrie du divertissement, du cinéma et de l’audiovisuel

L’Art. 89 du Décret Cura Italia a créé deux fonds, d’une valeur totale de 130 millions d’euros, pour soutenir les secteurs du divertissement, du cinéma et de l’audiovisuel à la lumière des conséquences négatives découlant des mesures restrictives adoptées pour contrer la pandémie COVID-19. En effet, à partir du 8 mars 2020, le gouvernement italien a suspendu les manifestations cinématographiques et théâtrales au niveau national (art. 2 du DPCM du 8 mars 2020). Les critères de répartition de ces ressources entre les « opérateurs, y compris les artistes, les auteurs et les interprètes » seront déterminés par le Décret du Ministre des Biens et des Activités Culturelles et du Tourisme, qui sera adopté dans les 30 jours suivant l’entrée en vigueur de la loi de conversion du Décret Cura Italia.

En outre, l’Art. 88 du Décret Cura Italia prescrit qu’à partir du 8 mars 2020, l’exécution des contrats pour l’achat de billets de spectacles de toute nature, y compris de spectacles cinématographiques et théâtraux, devient impossible pour cause de force majeure. Par conséquent, les vendeurs sont tenus de rembourser les acheteurs au moyen de bons d’une valeur égale à celle des billets achetés ; les acheteurs n’ont pas droit au remboursement des fonds. À cette fin, dans un délai de trente jours à compter de la date d’entrée en vigueur du Décret Cura Italia, les acheteurs doivent présenter des demandes de remboursement spécifiques aux vendeurs. Dans les trente jours suivant la présentation des demandes susmentionnées, les vendeurs doivent délivrer les bons. Les bons doivent être utilisés dans un délai d’un an à compter de leur émission.

En outre, l’art. 61, alinéa 2, let. b) a prolongé la suspension du paiement des retenues à la source, des cotisations de sécurité sociale et d’assistance et des primes d’assurance obligatoire pour les entités gérant des salles de cinéma jusqu’au 30 avril 2020. En outre, des indemnités extraordinaires sont prévues pour les travailleurs du secteur du divertissement et sont également étendues aux travailleurs sans prestations de sécurité sociale. Il existe également un fonds de licenciement pour les petites entreprises.

  • Mesures concernant spécifiquement les journaux, les magazines, les stations de radio locales et les chaînes de télévision locales

La forte diminution des investissements publicitaires observée à la suite de la pandémie COVID-19 pourrait sérieusement affecter de nombreux éditeurs et entreprises de médias. Pour cette raison, l’Art. 98 a établi un régime extraordinaire pour l’accès au crédit d’impôt pour les investissements publicitaires réalisés par les annonceurs dans les journaux, les magazines, les stations de radio locales et les chaînes de télévision locales. Plus précisément, l’article 98 prévoit un crédit d’impôt à hauteur de 30 % de la valeur totale des investissements réalisés.

  • La suspension des procédures administratives

L’Art. 103 a suspendu jusqu’au 15 avril 2020 tous les termes relatifs aux procédures administratives en cours à partir du 23 mars. Le champ d’application de la disposition couvre toutes les procédures administratives, qu’elles soient engagées par une partie ou d’office.

  • Les mesures adoptées à l’égard des opérateurs de télécommunications

L’Art. 82 du Décret Cura Italia prévoit que jusqu’au 30 juin 2020, les entreprises qui fournissent des réseaux et des services de communications électroniques doivent prendre les mesures appropriées pour moderniser leurs infrastructures et assurer leur bon fonctionnement, ainsi que pour veiller à ce que les services qu’elles offrent restent opérationnels de manière continue. En outre, les entreprises fournissant des services de communications électroniques accessibles au public doivent prendre toutes les mesures nécessaires pour améliorer et garantir un accès ininterrompu aux services d’urgence.

  • Prolongation du mandat de l’AGCOM

L’Art. 117 du Décret Cura Italia a prolongé le mandat des membres du Conseil de l’AGCOM 60 jours après la fin de l’urgence sanitaire COVID-19. Le mandat des membres actuels de l’AGCOM devait prendre fin le 24 juillet 2019 ; toutefois, ce délai a été progressivement prolongé par une série de décrets législatifs et, finalement, par le Décret Cura Italia. L’actuel conseil de l’AGCOM ne pourra mener que des activités dans le cadre de son fonctionnement normal et son mandat prendra fin une fois que les nouveaux membres auront été élus par le Parlement italien. Cette élection peut avoir lieu à tout moment, y compris avant la fin du délai prolongé.

Les mesures adoptées par l’AGCOM

  • Résolution n° 129/20/CONS

La Résolution n° 129/20/CONS (la « Résolution ») adoptée le 18 mars 2020 affirme la nécessité de respecter les principes applicables pour garantir l’exactitude des informations sur le sujet COVID-19.

Conformément à l’Art. 1, alinéa 1, les fournisseurs de services audiovisuels et radiophoniques sont invités à assurer une couverture informationnelle adéquate et complète du sujet COVID-19 en s’engageant à faire tout leur possible pour garantir le témoignage d’experts scientifiques et médicaux faisant autorité afin de fournir aux citoyens des informations vérifiées et confirmées.

Considérant qu’une vaste gamme de contenus est fournie sur les plateformes de partage de vidéos, ainsi que sur les réseaux sociaux, mais qu’elle ne relève pas de la responsabilité éditoriale des fournisseurs, conformément à l’Art. 1, paragraphe 2, ces derniers doivent adopter toute mesure appropriée pour contrecarrer la diffusion d’informations incorrectes – ou diffusées par des sources non confirmées scientifiquement – sur la COVID-19. Ces mesures doivent comprendre des mécanismes efficaces pour détecter et signaler les activités illicites et leurs auteurs.

  • L’affaire Panzironi

Un jour seulement après l’adoption de la résolution, le 19 mars, l’AGCOM a publié un communiqué de presse dans lequel elle annonçait qu’elle avait engagé une procédure administrative contre deux chaînes de télévision pour avoir accueilli l’émission « Il Cerca Salute – LIFE 120 » de Adriano Panzironi. La procédure de l’AGCOM vise à déterminer si M. Panzironi a diffusé des informations trompeuses et scientifiquement non confirmées. Dans le communiqué de presse, l’AGCOM a souligné qu’à l’issue de la procédure, l’AGCOM peut suspendre l’activité de la chaîne pour une période allant jusqu’à six mois et, dans le cas le plus grave, peut même lui retirer sa licence.

L’AGCOM a fourni de plus amples détails sur l’affaire Panzironi dans une lettre adressée aux plateformes de partage de vidéos et de réseaux sociaux, publiée sur son site Internet quelques jours après le communiqué de presse du 19 mars.

  • La lettre adressée aux plateformes de partage de vidéos et de réseaux sociaux

Le 21 mars 2020, l’AGCOM a publié sur son site Internet une lettre intitulée « Sauvegarde de la santé publique en vertu de l’art. 32 de la Constitution – Mise en œuvre des mesures visant à contredire les fausses nouvelles ou les nouvelles incorrectes relatives à l’urgence sanitaire de la COVID-19; Résolution n° 129/20/CONS du 18 mars 2020 » (la « Lettre »). L’AGCOM explique que la Lettre a été publiée parce qu’elle a ressenti le besoin de donner des indications aux plateformes de partage de vidéos et aux réseaux sociaux en soulignant l’importance de diffuser des informations correctes et scientifiquement fondées concernant le COVID-19 par ces moyens de communication.

La Lettre rappelle expressément l’affaire Panzironi.

Compte tenu du rôle particulier joué par les plateformes de partage de vidéos et par les réseaux sociaux dans ce contexte, l’AGCOM a demandé à être informée par les plateformes sur les initiatives qu’elles ont adoptées ou qu’elles ont l’intention d’adopter pour contrecarrer la désinformation médicale relative au COVID-19.

  • Les premières mesures urgentes pour les opérateurs de télécommunications

A la lumière de l’Art. 82 du Décret Cura Italia, le 20 mars 2020, l’AGCOM a adopté un Acte destiné à tous les opérateurs de télécommunications contenant les premières mesures qu’ils adopteront pendant la pandémie COVID-19. Ces mesures comprennent: i) identifier les solutions techniques permettant d’augmenter immédiatement la largeur de bande moyenne par client, sur un réseau fixe, d’au moins 30 %; lorsque cela n’est pas techniquement possible, les opérateurs fournissent à l’AGCOM tous les éléments utiles à l’évaluation pertinente; ii) recommander aux consommateurs finaux, par le biais des canaux de communication habituels, d’utiliser de préférence l’accès fixe (y compris le wi-fi) pour éviter la surcharge des réseaux mobiles; iii) proposer à l’AGCOM toute mesure raisonnable et temporaire de gestion du trafic, à vérifier ensuite par l’Autorité, visant à éviter la congestion et la saturation des réseaux fixes et mobiles, conformément à la réglementation en vigueur et aux initiatives prises dans le domaine du Berec.

  • L’institution de tables rondes techniques avec les opérateurs

Pour remédier à la situation décrite ci-dessus, l’AGCOM a également décidé d’instituer quatre tables rondes techniques dans les domaines suivants : i) télécommunications et consommateurs ; ii) services postaux ; iii) services de médias ; iv) plateformes numériques et big data.

Chaque table ronde dispose d’une adresse électronique spécifique que les opérateurs et les entités habilitées peuvent utiliser pour exprimer leur intérêt à participer et pour la transmission de documents, de propositions et de rapports.

L’activité de la table ronde sur les télécommunications et les consommateurs se concentrera sur la mise en œuvre des initiatives prévues par l’art. 82 du Décret Cura Italia et à l’analyse des propositions envoyées par les opérateurs et les autres entités impliquées dans la chaîne des TLC.

L’activité de la table ronde sur les services de médias se concentrera sur le contrôle du respect par les opérateurs de la résolution n° 129/20/CONS. Ces activités seront coordonnées afin de garantir que les citoyens reçoivent des informations vérifiées et scientifiquement fondées concernant la pandémie de la COVID-19.

L’activité de la table ronde sur les plateformes numériques et sur le big data sera axée sur la mise en œuvre d’initiatives visant à lutter contre la désinformation en ligne relative à la pandémie de la COVID-19. Il est intéressant de remarquer que la table ronde vise également à servir de point de connexion entre les plateformes en ligne, les parties prenantes et d’autres institutions italiennes concernant l’utilisation des big data pour l’identification des mesures possibles de lutte contre la contagion.

  • Prolongation du délai de paiement de la contribution annuelle de l’AGCOM

Enfin, il convient de noter que par la Résolution n° 111/20/CONS, l’AGCOM a prolongé le délai de paiement de la contribution annuelle pour les opérateurs dont le chiffre d’affaires est inférieur ou égal à 50 millions d’euros jusqu’au 15 juin 2020.

Article inséré dans: Media, COVID-19
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